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J’étudie à la Sorbonne – Assas, deux Universités très prisées

Tu te demandes comment fonctionnent des Universités de prestige comme la Sorbonne ? Tu n’es pas sûr.e que les longues études soient faites pour toi ? Athina, 25 ans, originaire de Hurtigheim étudie à La Sorbonne et l’Université Paris 2 Panthéon Assas, deux Université réputées de Paris, depuis 7 ans ! Elle t’explique le fonctionnement de ses études, les démarches et critères d’admission et te parle aussi confiance en soi et moments de doutes…


Pour commencer, j’ai passé mes années collège à Truchtersheim avant de préparer le bac ES au Gymnase Jean Sturm à Strasbourg. J’ai ensuite intégré un bicursus droit-histoire aux universités Paris 2 Panthéon Assas et Sorbonne Université (anciennement Paris 4) au terme duquel (c’est-à-dire 3 ans) j’ai obtenu deux licences : l’une en droit et l’autre en histoire. A ce moment, j’ai choisi de poursuivre mes études en histoire dans le cadre des masters de recherche 1 et 2 “Mondes arabes et musulmans” à la Sorbonne, en me spécialisant sur l’histoire de l’Islam médiéval. Cette formation est riche car elle permet d’assister à des cours très variés touchant au monde arabe selon nos centres d’intérêts (histoire, droit, géographie, langue, philosophie, anthropologie, etc.), tout en rédigeant deux mémoires de recherche (en première et deuxième année) dans notre domaine de spécialité. J’ai donc réalisé mes mémoires sur, grosso modo, l’histoire du droit musulman à l’époque médiévale. En master 1, j’ai aussi entamé une formation en langue arabe en débutant par un diplôme universitaire (DU) à la Sorbonne. J’ai ensuite passé plusieurs mois à Tunis quand j’étais en master 2, avant d’étudier un an à Beyrouth pour y suivre un stage intensif de langue grâce à la bourse dite “arabisante” du Ministère de l’Enseignement Supérieur.

Cette année, je prépare le concours de l’agrégation d’histoire à Panthéon Sorbonne (Paris 1).

Après le lycée, comme je n’avais pas d’objectif professionnel précis, je souhaitais d’abord intégrer Sciences Po Paris, qui a l’avantage de proposer une formation initiale généraliste. Mais je n’ai pas été admise après l’oral. Avec du recul, j’en suis bien contente car la formation ne m’aurait pas convenu. Les études à la fac sont d’une richesse incroyable qui permettent de découvrir des champs disciplinaires avec une grande liberté, tout en acquérant des connaissances approfondies et une rigueur scientifique.
Sinon mon plan C était d’intégrer le collège de droit à Assas (une sorte de licence de droit sélective) et mon plan D de poursuivre une licence d’histoire à Strasbourg.

Assas et la Sorbonne, c’est quoi exactement ?

La Sorbonne comme Assas sont deux universités parisiennes prestigieuses (au moins dans les représentations collectives) et prisées dans leurs domaines. Elles fonctionnement globalement comme d’autres universités. 📚

Paris 2 Panthéon Assas, surnommée “Assas”, est une université où s’étudie principalement le droit, mais aussi l’économie-gestion et les sciences politiques. La licence de droit (comme ailleurs) est une première étape des études juridiques ; on étudie alors aussi bien le droit privé que le droit public. De manière non-exhaustive, j’ai suivi des cours de droit constitutionnel, droit de la famille, droit des contrats spéciaux, droit international public, droit fiscal, droit administratif, philosophie du droit, histoire du droit… et j’en passe ! L’idée étant d’acquérir une culture juridique, tout en se spécialisant progressivement avant le master (en L3, il faut choisir entre un “package” de matières orienté plutôt vers le droit public ou plutôt vers le droit privé).

Quant à la Sorbonne… déjà, il n’existe pas “une” Sorbonne mais “des” Sorbonne. Cela en raison de plusieurs scissions et de regroupements universitaires depuis la création de l’université au XIIIe siècle. Il existe donc aujourd’hui plusieurs universités à Paris qui portent le nom “Sorbonne” comme Paris 1 Panthéon Sorbonne ou Sorbonne Université. Elles regroupent chacune différentes facultés (histoire, langues, sciences, lettres, médecine, etc.). En licence et en master, j’étudiais l’histoire à la Faculté des Lettres de Sorbonne Université (anciennement Paris 4 Paris-Sorbonne, et qui comprend notamment l’UFR d’histoire). La licence d’histoire consiste à étudier différentes thématiques dans les quatre périodes historiques (ancienne, médiévale, moderne, contemporaine). Chacun fait sa soupe. J’ai ainsi suivi des cours aussi bien sur les religions de l’Antiquité au Proche-Orient, la Grèce antique, le Haut Moyen Age en Occident, les révolutions à l’époque moderne, le Moyen-Orient contemporain, que sur l’Islam médiéval… Bref, comme pour le droit, le but est de construire une culture historique large pour ensuite choisir une période et un thème de spécialité en master.

L’admission

Le bicursus droit-histoire est accessible directement après le bac général (quel qu’il soit). Pour cela, il faut candidater à l’une ou l’autre des universités (Sorbonne ou Assas, cela n’a pas d’importance). A mon époque, la procédure était indépendante des admissions post-bac et des contraintes de secteur : c’est pour cela que la formation pouvait intégrer des personnes venant d’horizons variés (Strasbourg, Dijon, Perpignan, Reims, Paris bien sûr ). Le jury sélectionne alors une série de dossiers soumis (les résultats du lycée et du bac, une lettre de motivation) et convoque ces candidats à un entretien oral qui se tient à Paris devant 3-4 professeurs des deux universités responsables de la formation. C’est essentiellement un entretien de personnalité et de “vérification” : vérifier notre motivation, nos objectifs d’étude, notre capacité de travail, les contraintes éventuelles qui peuvent se poser aux étudiants ne venant pas de Paris, notre culture générale. In fine, 30 étudiants ont été sélectionnés pour ma promotion.

Personnellement, je ne me suis pas particulièrement préparée pour l’entretien oral. Comme pour tout entretien, il faut savoir mettre en avant ses qualités, être honnête et assumer ses lacunes. Il est bon également de connaitre la formation à laquelle on candidate (en quoi consistent des études de droit ? qu’étudie-t-on dans une fac d’histoire ?) de sorte à montrer sa motivation et pouvoir répondre à des questions du type “pourquoi voulez-vous faire ça ?”.

Surtout, ne pas oublier qu’il n’existe pas de “bonne” réponse absolue lors de ces entretiens.

Qu’attend-on d’un bon candidat ?

Selon moi, les principaux éléments sur lesquels se fonde le jury sont la motivation et l’aptitude de la personnes à fournir un travail rigoureux et important en quantité. Ce dernier élément est essentiel car jongler entre deux lieux d’études, deux diplômes et les exigences des professeurs de chacune des universités n’est pas forcément aisé. Avoir une idée précise de son projet professionnel n’est absolument pas requis. A mon époque, le jury attachait aussi de l’importance à la curiosité et à l’ouverture d’esprit des candidats : il ne faut pas oublier que l’on découvre deux disciplines qui n’ont (presque) rien à voir avec les matières étudiées au lycée. Les membres du jury étaient par exemple enchantés que je parle plusieurs langues, que j’ai fait du latin et que j’ai suivi des cours de cinéma audiovisuel au lycée.

Avoir une idée précise de son projet professionnel n’est absolument pas requis.

Il n’existe pas de “barre d’admission” officielle pour le bicursus, mais disons que 14/20, voire 13/20, était la limite basse des moyennes des candidats admis. La majorité devait tourner autour de 15-16/20. Mais encore une fois, la rigueur, la motivation et la curiosité prévalent en fin de compte lors de l’entretien oral. Les résultats scolaires ne sont pas déterminants pour la suite : un élève moyen au lycée peut se révéler excellent à l’université et inversement. Tout est question d’apprentissage et d’adaptation aux exercices et à la méthodologie spécifiques demandés lors des études de droit et d’histoire.

Moi-même, j’ai toujours eu de bonnes notes au collège et au lycée, sans vraiment m’acharner au travail. Pour autant, je n’avais pas d’idée précise, ni fixe, de mon avenir professionnel. Je voulais simplement apprendre et découvrir de nouvelles choses. Peut-être ai-je toujours eu l’obsession de comprendre “comment les choses marchent”. Et j’ai toujours eu un tropisme pour les domaines créatifs (oui, il faut avoir de la créativité en histoire !). En tout cas, ce n’est certainement pas au lycée que l’on se devine une vocation pour l’enseignement et la recherche en histoire médiévale.

Le coût

La Sorbonne comme Assas sont des universités publiques ; les droits d’inscription sont donc modérés, sachant en plus qu’un étudiant boursier ne paie pas de frais d’inscription. Dans le cadre d’un bicursus, l’étudiant verse des frais d’inscription aménagés. De mémoire, une année de licence devait s’élever à 350 euros environ. C’est à peu près la même chose en master. Au delà des frais d’inscription universitaires, il ne faut toutefois pas oublier le coût de la vie à Paris qui est plus élevé qu’ailleurs en France. 💰

Le fonctionnement

La Sorbonne (et Assas) fonctionne comme tout autre université, même si le nombre d’étudiants y est plus important. Dans ma promotion stricto sensu (le bicursus), nous étions 30 au départ et 13 à l’arrivée. Mais nous étions mélangés à tous les autres étudiants de licence puisque nous préparions les mêmes diplômes. Je ne saurais évaluer le nombre d’étudiants au total dans chaque formation, mais beaucoup ! Les amphis étaient souvent bondés en L1 (en particulier les premiers mois). Le nombre diminue ensuite à mesure que les personnes abandonnent leur formation ou redoublent (il n’y a pas de limite au redoublement). En master, nous étions une petite dizaine en première année ; 4 ou 5 la deuxième année.
En bicursus, il faut compter une trentaine d’heures de cours par semaine, cours magistraux et travaux dirigés cumulés. Nous avions bien plus d’heures de cours en droit (seulement 12h en histoire), qui demandaient un travail personnel aussi plus important.
Pour valider l’année et passer à la suivante, il faut obtenir la moyenne dans chacune des deux universités. La moyenne se calcule à partir d’un contrôle continu durant l’année et des notes obtenues aux partiels en fin de semestre.

Comme le bicursus nous forme à la fois en droit et en histoire, nous avions deux fois plus de travail que les étudiants ordinaires (même si nos emplois du temps étaient “un peu” aménagés). Les deux disciplines demandent de fournir un travail personnel important puisque l’assimilation des connaissances ingurgitées et de la méthodologie ne peut se faire seulement en cours. Outre les devoirs hebdomadaires en droit (dissertation, commentaires d’arrêt) et les travaux réguliers en histoire (dissertation, fiches de lecture, commentaires de texte, exposés oraux en groupe ou individuels), il faut consacrer un certain temps à l’apprentissage des cours (qui approche le par cœur en droit) et la lecture d’ouvrages complémentaires.
Les travaux de groupe sont donc assez marginaux, ce qui n’empêche pas de travailler en groupe (certains apprécient de travailler ou réviser à plusieurs).

Les qualités pour entreprendre des études longues ? Selon moi, vouloir apprendre et savoir entretenir sa curiosité.

Théorique vs pratique

La licence d’histoire comme la licence de droit sont des formations théoriques. En droit, il est néanmoins bienvenu de faire des stages l’été, en cabinet juridique par exemple, si l’on souhaite poursuivre des études de droit en master. Ensuite, cela dépend de la formation.

Les débouchés

Les débouchés sont extrêmement divers ! En particulier dans le cadre du bicursus droit-histoire qui permet de se diriger vers un master d’histoire ou de droit, voire de sciences politiques, de relations internationales ou que sais-je encore. Le choix est vaste. Il en va logiquement de même pour les débouchés professionnels. Pour en citer quelques-uns : juge, avocat, conseiller juridique, journaliste, assistant parlementaire, fonctionnaire au sein d’un ministère, entrepreneur dans le milieu culturel, enseignant-chercheur…

Savoir se faire confiance…

Il est certes très difficile d’intégrer des universités comme la Sorbonne ou Assas par les voies “normales” quand on ne vient pas de Paris et ses environs, tout simplement pour des raisons de secteur académique. Nombreux sont déjà ceux de la région parisienne qui cherchent à intégrer ces universités après le bac. Les bicursus (il en existe de plus en plus) représentent en cela un avantage puisqu’ils ne discriminent en principe pas les étudiants selon leur lieu d’origine.
La confiance en soi et en ses capacités s’acquiert progressivement.

Il n’y a pas lieu de se censurer par peur de l’échec sans même avoir tenté l’expérience.

Par ailleurs, il est important de démystifier ces universités dites prestigieuses. L’enseignement y est de qualité, mais les étudiants n’y sont pas dotés d’une intelligence supérieure : il n’y a pas lieu de se penser “moins bon que” ou “pas assez bon”. Certes, les exigences des professeurs peuvent y être plus élevées que dans d’autres universités, en particulier à Assas. Encore que ! Nombre d’étudiants ne réussissent pas non plus du premier coup à passer en deuxième année de licence à Strasbourg. Et ce n’est pas un drame. C’est simple : pour obtenir son/ses diplôme(s), il faut travailler. Il est aussi essentiel de choisir un domaine qui nous passionne ou qui entretient notre curiosité.
Aussi, nous étions 30 au départ dans ma promotion de bicursus. Au bout de trois ans, nous n’étions plus qu’une dizaine. Certains ont constaté que la formation ne leur convenait pas dès les premiers mois (car trop exigeante), d’autres qu’ils n’aimaient pas le droit ou l’histoire, etc. Toutes ces personnes ont poursuivi des parcours qui leur conviennent à présent.

…même quand le doute s’installe

A bac+7, il est normal (voire sain) d’avoir eu des moments de doute et de toujours en avoir. L’un des plus marquants, sans doute, a eu lieu en troisième année de licence au moment où je devais choisir la discipline vers laquelle m’orienter. J’ai choisi l’histoire sans trop hésiter car je m’y épanouissais bien plus qu’en droit (contrairement à la majorité de mes camarades). Ce n’est pas toujours chose facile considérant les clichés qui entourent certaines formations en sciences humaines (“glandeurs”, “futurs chômeurs”, “intellos”, “pas d’avenir”).

La vie parisienne et étudiante

Déménager à Paris ne m’a pas posé de difficultés particulières et j’étais ravie de prendre de nouvelles habitudes. J’ai d’abord habité en collocation avec une connaissance, ce qui a peut-être facilité mon adaptation. Même si je me garde bien de prêcher tout parisianocentrisme, Paris reste une ville très stimulante pour les étudiants que ce soit pour se cultiver, sortir ou faire des rencontres. Le plus fastidieux était sans doute les déplacements : en première année, les cours d’histoire avaient lieu sur un campus à l’extrême nord de Paris, quand les cours de droit avaient lieu à l’extrême sud. Aujourd’hui, tous mes cours ont lieu à la Sorbonne “mère” et je me déplace tranquillement à vélo. 🚲

Il y a bien sûr de nombreuses organisations et associations étudiantes dans les deux universités : cela va des associations de musique aux ateliers d’éloquence, en passant par les BDE, les syndicats étudiants, les associations sportives, culturelles ou d’entre-aide, les groupes de réflexions, les revues étudiantes… qui organisent des manifestations tout au long de l’année (concours de talents, soirées étudiantes, conférences, compétitions sportives, concerts, voyages au ski ou à l’étranger, etc.).
Il y a de tout et pour tous les goûts.

Mes projets à venir ? Je prépare actuellement le concours pour obtenir l’agrégation d’histoire. Ensuite, j’ai pour projet de faire une thèse dans la continuité de mes travaux de master.

Merci Athina 🙂

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